Page:Daveluy - L'esclave des Agniers, 1933.djvu/107

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qui se sentait guéri, grâce aux soins qu’on lui prodiguait depuis deux jours, repoussa avec brusquerie cette offre trop empressée du sauvage et déclara qu’il se sentait capable, même seul, de défendre une femme. Et comme, presque en se jouant, il venait d’abattre au vol un oiseau, on lui céda avec respect. Un excellent tireur était toujours certain d’en imposer aux sauvages. Charlot n’ignorait pas ce trait de caractère, commun à tous les enfants des bois, et venait d’en user à propos.

Un feu de pin rougeoyait encore. Charlot, dès que les sauvages eurent disparu, ranima ce feu et ayant préparé l’oiseau qu’il venait de tuer, il le jeta dans le peu d’eau restée au fond d’un petit pot de fer. Un peu de bouillon ferait du bien à sa compagne. Quant à lui, une portion d’anguille boucanée, qu’il avait ménagée à dessein la veille au soir, soutiendrait vaille que vaille ses forces.

« Mon frère est bien silencieux, dit soudain l’Algonquine. A-t-il le cœur oppressé par quelque peine ? »

Charlot haussa les épaules, mais ne répondit pas. Il s’affaira de plus en plus à sa besogne. La jeune fille un peu surprise, mais respectant le mutisme de son compagnon, se tint silencieuse à son tour.

Charlot lui tendit enfin un bouillon chaud. Tandis qu’elle le buvait, il se glissa soudain à ses pieds.