Page:Daveluy - L'esclave des Agniers, 1933.djvu/12

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permettrait que ce chagrin écrasant atteignit ta Perrine. Frère, frère, pourquoi es-tu ainsi parti, un jour. Ô enfant imprévoyant, téméraire, demeuré sans pitié devant mes larmes. Mon bouleversement à l’heure de ton départ, je le vois maintenant, c’était plus que de la tristesse, c’était la force d’un tragique pressentiment qui m’enveloppait toute l’âme. Ah ! la seule et faible clarté, qui soutient mon cœur, aujourd’hui, c’est, Charlot, de te savoir sous la garde et la protection de Kinaetenon. Il t’aime bien, celui-là, mon frère. La promesse que j’ai obtenue de lui à ton sujet, sans que tu le saches, à ton départ, avec quelle gravité profonde il y a consenti. Je sentais qu’il n’y manquerait jamais, jamais. Parle-lui de ma reconnaissance. Dis-lui quelle confiance, je mets sans cesse en lui. Oh ! Kinaetenon, Kinaetenon, de penser qu’il te tient en ce moment sous ses yeux, qu’il peut recueillir tes sourires ou alléger ta peine ; il garde vois-tu, ce que j’ai, moi, de plus cher en ce monde, mon frère, mon Charlot.

Feu se rendra-t-il sans trop d’encombre ? C’est mon espoir. Il me brûle tout l’être. Hélas ! sais-tu que depuis trois longs mois, je guette une chance de t’envoyer, notre bon Feu. Aucun Huron, aucun Algonquin n’a voulu s’en charger, malgré mes supplica-