Page:Daveluy - L'esclave des Agniers, 1933.djvu/164

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fille. Elle se tint les yeux baissés, durant toute l’entrevue, si je me souviens bien.

— Et, reprit Charlot avec peine… elle est sans doute… mariée, maintenant ? » Ses yeux, où glissaient un chagrin immense, interrogeaient le Père, encore plus que ses paroles.

— Non, je ne la crois pas mariée, Charlot. Car… une semaine plus tard, le Huron qui devait l’épouser entrait ici, furieux, menaçant, réclamant sa fiancée algonquine qui s’était enfuie durant la nuit.

— Non ? Et vous ne me trompez, pas ? Justes cieux, quel bonheur j’éprouve de la savoir hors des griffes de son ravisseur. Père, cria Charlot, en se levant avec impétuosité, les yeux rayonnants. la main posée sur son épée, comme pour parer déjà à quelque danger, Père où croyez-vous qu’elle puisse être allée se réfugier ? Dites-moi ? De grâce !

— Pourquoi, Charlot ? demanda avec calme le Père.

— Pourquoi, pourquoi ? reprit Charlot. Mais Père, parce que je l’aime, parce que je ne puis vivre sans elle, parce que j’ai fait des milliers de lieues pour la rejoindre coûte que coûte.

— Et une fois que vous serez en sa présence à quoi cela vous aura-t-il servi ? À vous faire souffrir tous deux inutilement, car, je suppose, Charlot, que vous n’avez pas le dessein de l’épouser, d’épouser une femme sauvage, une Algonquine ?

— Ce ne serait pas un crime.