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une révolte au pays des fées

Deux fois le jour, la gardienne de la princesse, la Sorcière d’Haberville, soulevait la pierre d’entrée. L’insulte à la bouche, elle pénétrait. Elle déposait sur un roc énorme servant de table, un cruchon d’eau, du pain noir, et une nouvelle torche fumante. Elle faisait ensuite le tour de la caverne. Elle regardait partout avec méfiance.

Jusqu’ici, la princesse avait pu dissimuler, sous un coin de sa paillasse, placée au fond de la pièce, le bébé endormi. Elle frémissait à chaque nouvelle visite. Elle n’osait rien conjecturer sur ce qui surviendrait au premier cri poussé par le petit innocent. Tout ce qu’elle pouvait affirmer, c’est qu’on lui enlèverait la vie plutôt que de permettre qu’on touchât même à un petit doigt du tendre agneau, qui était tombé, un soir, au milieu de loups dévorants.

Un matin, à l’aube, alors que la princesse se penchait à son ordinaire sur la mince figure de son fils, elle entendit près d’elle fuser un rire aigu. Au même moment, une lourde pierre se détachait de la muraille et tombait presque à ses pieds.

La princesse se trouva debout, étouffant un cri d’épouvante. Puis, non sans maladresse, vivement, elle vint se placer devant son fils qui s’éveillait en geignant.

Le rire reprit. Messire Polichinelle apparut dans le trou béant du mur. Il regarda, puis sauta dans la pièce et s’approcha de la princesse, joyeux et sautillant, une chanson sur les lèvres. Il s’inclina profondément. On n’aurait su vraiment, à la cour du roi Grolo, se montrer ni plus respectueux, ni plus gracieux.