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une révolte au pays des fées

cédés à suivre, pour mener à bien les embûches ; ceux-là encore, à gauche, de petits flacons soigneusement étiquetés, renfermaient, en doses promptes, nombre de philtres de révolte ; enfin, au centre, en de larges chaudrons bouillonnants, se cachait en quantité suffisante, la cire destinée aux métamorphoses. « Oui, oui, disait à mi-voix la Sorcière, tout cela me paraît en état ; tout cela mijote, flambe, écume, brille, rougeoie. »

Elle s’enfonça davantage dans la chambre. Elle tenait à faire le compte de ses animaux favoris, auxquels se joindraient bientôt ceux des autres rebelles. L’espace ne manquerait à aucun d’eux, car la chambre secrète de la grotte menait à un spacieux souterrain. Armée d’un balai, ou plutôt de fagots épineux, elle frappa de grands coups à droite et à gauche. À sa vive satisfaction, elle entendit hurler, siffler, aboyer, croasser. Donc, tous : loups, dogues, serpents, chauves-souris et autres bêtes, se tenaient là, prêts à servir ses ingénieux desseins. La Sorcière se mit à rire, conduisant ainsi le chœur infernal des animaux de la grotte.

Tout à coup, elle s’interrompit, se disant avec raison que l’heure avançait, et qu’elle devait s’assurer de la tranquillité des alentours de la caverne. Elle sortit, et vint humer avec colère l’air du dehors. Cette immense forêt du Lac Saint-Jean l’irritait, la décevait. Elle résistait mal à ses puissantes réactions. Il y soufflait un air vivifiant, peu propice aux engourdissements féeriques. Ah ! comme elle regrettait son petit bois touffu de Saint-Jean-Port-Joli, à jamais enchanté par sa présence et ses gestes. Mais contre l’ordre de ses chefs, elle n’avait pas voulu lutter. Elle s’en