Page:Daviault - Histoires, légendes, destins, 1945.djvu/105

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

rien à voir avec la pièce. « Et puis, après ? Le public n’y verra que du feu ! »

— À propos de Sarah, rappelons qu’un soir, irritée contre les mauvais hôtels où la promenait son imprésario, elle remplaça une longue tirade de son rôle par une charge à fond de train contre les hôtels américains. Personne ne s’en aperçut, pas même les critiques qui se piquaient de connaître parfaitement le français, et l’on applaudit à outrance la fougue qu’y avait mise la grande actrice.

— Le public n’est pas toujours plongé en des transes qui l’empêchent de bien se rendre compte. Un soir, le grand acteur sir Henry Irving jouait un sombre mélo sur une scène encore plus sombre.

Comme il venait de tuer son fils et s’écriait : « Grands dieux ! Qu’ai-je fait ? » une voix s’éleva dans le poulailler : « Frotte donc une allumette ; nous allons tous chercher avec toi ! »

— Une autre fois, sir John Hare (les acteurs anglais, du moins avant la guerre, se faisaient facilement sirer), jouant le rôle d’un vieux vagabond sympathique, cherchait dans sa poche des bribes de tabac pour en remplir sa pipe. Il sursauta soudain, un objet mystérieux lui ayant frôlé la tête. C’était un spectateur tout ému, des lointains balcons, qui lui lançait sa blague à tabac !

Le même John Hare, dans une autre pièce, défendait vaillamment sa femme, contre les accusations de son frère. « Très bien, cria tout à coup une voix partie des places populaires ; défends ta vieille ! »

— Wilson Barrett (par exception, il n’était pas sir) faisait remettre son théâtre à neuf. Les ouvriers travaillaient si bien et si diligemment qu’il résolut de les récompenser, par un supplément en plus de