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volume de son ouvrage intitulé la Vie secrète de l’Académie française.

Chateaubriand se composait un personnage. Acharné à se dire l’ennemi de Napoléon, il inventait des persécutions.

À la suite de l’exécution du duc d’Enghien, il avait donné sa démission de ministre plénipotentiaire dans le Valais. Plus tard, dans les Mémoires d’Outre-tombe, il raconta que l’incident avait causé une tragédie et qu’il avait dû s’enfuir.

À vrai dire, apprenant la démission (causée par l’état de santé de Mme de Chateaubriand), l’empereur avait dit simplement : « C’est bon ! » Puis il avait prié Talleyrand d’exprimer au ministre démissionnaire toute la bienveillance qu’il lui conservait. Chateaubriand partit pour la montagne, écrivant à un ami : « Je vais dans un trou horrible. J’espère n’y faire qu’un court séjour et solliciter quelque place obscure dans une bibliothèque qui me fixe à Paris ». Dans les Mémoires, cela devint : « J’étais bien aise de m’enfuir aux montagnes ! »

Élu à l’Académie, le grand écrivain prépara son discours de réception, qu’il lut ensuite, selon l’usage, devant une commission d’académiciens. Ce fut un scandale : le morceau renfermait une charge à fond de train contre les régicides, dont le prédécesseur Chénier fournissait le prétexte. Or, l’Académie comptait plusieurs personnages qui avaient voté la mort de Louis XVI : Sieyès, Merlin de Douai, Cambacérès. Or, ce dernier était le second personnage de l’État. Mais au fait, Napoléon se fit apporter le discours, qu’il corrigea, ratura, modifia. Son auteur eut ordre de le prononcer dans cet état. Chateaubriand, qui n’était pas breton pour rien, s’entêta ;