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civil dans l’expédition. Il vivait et mangeait, cependant, avec les officiers. Quand, pris dans les glaces, le capitaine promulgua un règlement assez sévère pour éviter l’indiscipline, Collins se révolta. On eut beau lui faire remarquer que les officiers eux-mêmes devaient se soumettre au règlement, il invoquait son titre de représentant de Gordon Bennett pour n’en faire qu’à sa tête. Son exemple aurait pu être néfaste. De Long dut se montrer ferme et même sévir, quand l’insubordination de Collins dépassa toutes les bornes. Le malheureux journaliste, dont l’humeur venait de son peu de préparation à une telle aventure et peut-être de la méfiance de ses compagnons qui redoutaient ce qu’il pourrait écrire au retour, faillit hâter le dénouement fatal. Il ne devait pas raconter son voyage : le froid et la faim le vainquirent sur la côte de Sibérie.

De Long avait bien choisi son équipage. Ses hommes étaient capables d’une énergie extraordinaire quand se présentait un danger. Les glaces, en effet, avaient parfois des mouvements inquiétants et le navire pouvait être écrasé. Un jour, une fissure considérable se produisit. L’eau montait dans la coque, les pompes à bras ne suffisant plus. Sous la direction de Melville, l’équipage entreprit de remettre les chaudières sous pression, malgré le froid, malgré l’eau qui envahissait tout, malgré les difficultés sans nombre. Il faut lire ce récit pour comprendre ce que peuvent l’ingéniosité et le courage de l’homme.

En décembre 1880, la Jeannette sortait de sa prison. Mais la navigation était impossible dans une mer déchaînée, encombrée d’icebergs, de champs de glace. Jusqu’en juin 1881, elle s’en alla à la dérive,