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LE BARON DE SAINT CASTIN

aux machinations du juge Labaig qui refusait de rendre la succession, arguant, cette fois, de l’illégitimité de son neveu. En décembre de cette année-là, le jeune Saint-Castin avait voulu traverser l’Atlantique. Mais il venait de se montrer si utile dans la défense de Port-Royal et les Anglais restaient si menaçants que Subercase avait usé de toute sa diplomatie pour le garder.

« J’ai retenu le sieur de Saint-Castin, écrivait Subercase le 20 décembre 1708, qui voulait passer en France pour une chicane avec des parents voulant absolument qu’il soit bâtard malgré tous les certificats des missionnaires, des peuples, des témoins et de l’évesque même. Monseigneur obtiendra sans doute un ordre du roi pour surseoir grâce aux certificats que je prends la liberté de vous envoyer signés des missionnaires et de tous les anciens du pays. Ce pauvre garçon a à faire au premier chicaneur de l’Europe et lieutenant général de la ville d’Oléron en Béarn, qui depuis de longues années jouit de ce bien-là, et cette pauvre famille est dans la dernière misère, et qui n’auroit pas de pain sy d’honnestes gens ne se melloient de leurs affaires. Il espère Monseigneur que vous voudrés encore adjouter à la grâce que vous luy avés faite de commandant de Pentagoët celle d’y adjouter au moins les appointements de lieutenant dans ce pays ici parce qu’autrement il seroit obligé d’abandonner pour se retirer sur son bien en France n’ayant point d’autre ressource pour vivre, et je puis assurer à vostre Grandeur qu’il est utile dans ce pays icy. »

Les Anglais avaient, en effet, si bien saccagé ses établissements que Saint-Castin en était réduit à demander des appointements. On ne sait, du reste, ce qu’était devenue la grande fortune accumulée par Jean-Vincent à Pentagoët. Sans doute avait-elle fondu par l’effet des guerres incessantes.

Subercase avait communiqué au ministre des certificats si convaincants que M. de Pontchartrain chargea M. Méliand, intendant de Béarn, de régler l’affaire au plus tôt.

Labaig eut alors l’idée de s’en remettre à Pontchartrain de la décision. Il se trahissait du reste, puisqu’il acceptait d’avance toute proposition raisonnable, tenant compte de « l’état douteux du prétendu héritier ».

Le juge d’Oloron contestait une partie des réclamations de Bernard-Anselme de Saint-Castin. Par une convention, datée de 1703, Jean-Vincent de Saint-Castin avait cédé certaines créances à Labaig, en échange d’une somme de 22 000 livres. Mais Labaig se prétendait obligé à parfaire cette somme seulement après les recouvrements, opérations difficiles six ans après la contestation.