Page:Daviault - Le Baron de Saint-Castin, chef abénaquis, 1939.djvu/74

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
72
LE BARON DE SAINT-CASTIN

Saint-Castin à Pentagoët ». Mieux valait, ajoutait-il, abandonner aux deux rois le règlement des prétentions sur la place que de piller l’habitation d’un particulier 11.

Le gouverneur de la Nouvelle-France ignorait que son collègue de Boston (depuis 1687, gouverneur général de la Nouvelle-York, de la Nouvelle-Angleterre et du New-Jersey) dirigeait lui-même l’expédition. Il ne savait pas non plus qu’Andros, depuis longtemps, mettait tout en œuvre pour réduire Pentagoët à l’obéissance du roi d’Angleterre. On n’en veut pour preuve que l’ordre donné en 1687 à l’enseigne Joshua Vipon, commandant de Pemquid, de se rendre en voyage d’inspection à Penobscot avec mission d’engager les chrétiens à se tenir en contact avec Pemquid. Vipon devait aussi entamer des conversations avec les Indiens et remettre à Madokawando une belle couverte et un baril de rhum « pour boire entre eux » 12.

Prévoyant l’intervention des autorités supérieures, le capitaine Nicholson écrivait de Boston, le 31 août, que, d’après certaine rumeur, Saint-Castin avait paru à Penobscot avec un ingénieur afin d’y élever un fort 13. Saccardy, de fait, étudiait à cette époque les fortifications de l’Acadie. Sans doute s’était-il rendu à Pentagoët, mais Saint-Castin se trouvait alors auprès de Denonville. Dans une autre lettre, Nicholson prétendait que la barque envoyée de Québec par Saint-Castin avait été capturée par des pirates dans le « Gulf of Cancer ».

En général, on blâmait furieusement Andros de cette inqualifiable agression. Ce fut un des griefs formulés contre lui lors de la révolution à Boston, deux ans plus tard, car on voyait dans ce geste la cause de la guerre avec les Indiens. Andros parti, le gouvernement de Boston, désireux de rétablir la paix avec Pentagoët, envoya des excuses à Saint-Castin, lui affirmant qu’il n’avait été pour rien dans l’attaque 14.

Le voyage d’Andros occupa les diplomates. Denonville en instruisit le ministre Seignelay, qui chargea Bonrepaus de protester à Londres. Les Commissaires anglais reconnurent que le fort de Pentagoët était en territoire français, mais ils revendiquaient toujours l’autre rive de la rivière, point sur lequel les Français ne cédaient pas 15.

En dédommagement des dégâts causés par Andros, Saint-Castin reçut la concession de « deux lieues de front