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LAURIER ET SON TEMPS

d’inaction et de maladministration d’une nature grave dans des matières affectant la paix, le bien-être et le bon gouvernement du pays. »

Sir John Macdonald répondit à M. Blake avec son habileté ordinaire, et Laurier prit la parole.

Il fit un tableau touchant de la situation des Métis au Nord-Ouest, des injustices dont ils avaient été victimes ; il parla de leurs plaintes inutiles, de leurs efforts pour émouvoir le gouvernement et ses représentants, et termina son discours au milieu des applaudissements de la Chambre par la péroraison suivante :

« Le gouvernement savait ce qui se passait, et au lieu de redresser ces griefs, il envoyait la police à Carlton, afin d’en imposer au peuple. Voilà l’espèce de justice que ce peuple a reçue du gouvernement tant qu’il ne s’est pas révolté. Monsieur l’Orateur, s’il y a dans tout cela quelque chose de plus répréhensible dans la conduite du gouvernement, c’est bien le fait d’avoir envoyé des hommes de police à Carlton pour répondre aux pétitions du peuple par la force armée. Ce n’est pas là la justice britannique ; ce n’est pas ainsi qu’un gouvernement britannique répond d’ordinaire aux demandes de ses contribuables ; mais c’est ainsi qu’on administre la justice en Russie. C’est ainsi que la Russie répond aux demandes de la Pologne. Chaque fois que les Polonais se lèvent pour réclamer leurs droits, les Russes font exactement ce qu’a fait le gouvernement canadien : ils envoient des troupes armées à Varsovie.

« Ce n’est pas tout : il y a dans toute cette affaire, un autre point auquel on n’a pas touché à ma connaissance, et qui cependant paraît avoir frappé l’esprit de bon nombre de gens. On n’a pas exprimé ce sentiment, mais on dirait qu’il est dans l’atmosphère, non seulement dans cette Chambre, mais aussi dans le pays. On ne l’a pas dit, mais il y en a beaucoup qui croient que, si ces gens se sont révoltés, c’est parce qu’ils sont, jusqu’à un certain point, d’origine française.