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LAURIER ET SON TEMPS


La langue française


Pendant ce temps-là, de gros nuages venus du Nord-Ouest apportaient de nouvelles tempêtes.

Des lois avaient été adoptées par le Conseil des territoires du Nord-Ouest et par la Législature du Manitoba pour abolir l’usage officiel de la langue française dans leurs documents publics, et le gouvernement fédéral n’avait pas désavoué ces lois.

M. McCarthy avait déclaré devant la Chambre des Communes que l’usage officiel de la langue française devrait être aboli dans toutes les provinces anglaises. Dans le débat orageux que cette question souleva, Laurier prit la parole et plaida la cause de la langue française dans le langage le plus logique, le plus brillant.

Jamais il ne prit, devant une majorité anglaise, la défense de sa nationalité avec plus de vigueur et de courage. Comment les hommes raisonnables, faisant partie de cette majorité, auraient-ils pu s’empêcher d’applaudir aux paroles qui suivent :

« L’honorable député est fier de sa race et il a le droit d’en être fier, mais il ne s’ensuit pas que nous devions être tous Canadiens-anglais, que nous devions tous nous fondre dans l’élément anglo-saxon. Certes, personne ne respecte ou n’admire plus que moi la race anglo-saxonne ; je n’ai jamais dissimulé mes sentiments à cet égard ; mais nous, d’origine française, nous nous tenons pour satisfaits de ce que nous sommes et ne demandons rien de plus. Je revendique une chose pour la race à laquelle j’appartiens : c’est que, si elle n’est peut-être pas douée des mêmes qualités que la race anglo-saxonne, elle en possède de tout aussi grandes ; c’est qu’elle est douée de qualités souveraines à