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les patriotes

duisirent pas moins d’émoi parmi les bureaucrates. Un soir, la veille de la grande assemblée de Saint-Charles, ils paradèrent en grand nombre sur le Coteau Barron, à l’endroit maintenant occupé par MM. Lacroix et Dorion. Ils étaient mille à douze cents hommes, mais les yeux des bureaucrates, agrandis par la peur et la colère, en virent plusieurs milliers ; une armée de Vandales descendant sur Montréal n’aurait pas produit plus d’effet. Messieurs les Anglais, leurs épouses et leurs enfants ne dormirent pas de la nuit.

Le lendemain et les jours suivants, ce fut un déluge d’injures, d’imprécations et de menaces contre les Fils de la liberté, qu’on vouait aux gémonies, à tous les dieux de l’enfer. Les journaux anglais publièrent des écrits et des correspondances où l’on faisait les appels les plus échevelés au fanatisme de la population anglaise.

« Où sont donc les carabins, s’écriait dans le Herald un correspondant, où est la garde aux manches de hache ? où est ce Doric Club qu’on avait l’habitude de voir chaque fois qu’il s’agissait de défendre la constitution et l’honneur britannique ? Jusques à quand laisserons-nous faire ces scélérats révolutionnaires. »

Messieurs les Anglais ont la parole rude, il paraît, en temps de révolution ; tous les jours ils avaient de pareilles aménités à l’adresse des Canadiens et surtout des Fils de la liberté. Pourtant, si c’était un si grand crime de s’assembler, de voter des propositions énergiques, et de parader dans les rues, ils étaient coupables de ce crime autant que les Fils de la liberté, et même davantage, car ils ne se gênaient pas, eux, de porter des armes et de provoquer l’émeute et le désordre par leurs menaces et leurs imprécations. Les Fils de la liberté heureusement ne répondaient à ces provocations que par le mépris ; plusieurs fois, cependant,