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son frère Damien partirent, lorsqu’il n’y avait plus un moment à perdre, et se dirigèrent vers le sud, du côté des États-Unis. Ils avaient traversé le fleuve, à la tête du canal de Beauharnois, et se croyaient en sûreté, lorsqu’ils furent arrêtés par un parti de volontaires stationné au fort du Coteau-du-Lac. Ils avaient été vendus par un batelier, un traître et un lâche, qui, les ayant reconnus, était allé, après avoir reçu leur argent, avertir le colonel Simpson.

M. Masson et son frère Damien furent conduits au corps de garde du Coteau où ils passèrent la nuit. Le capitaine McIntyre, qui commandait les volontaires, étant tombé de son cheval, s’était blessé assez gravement. Il demanda au Dr Masson de le saigner. Les volontaires anglais jetèrent les hauts cris ; ils ne pouvaient comprendre que le capitaine consentît à se faire saigner par un rebelle. Le capitaine, qui était un homme d’esprit, se fit saigner quand même, et trouva que le docteur avait la main aussi sûre qu’un bureaucrate.

Pendant la nuit, le Dr Masson fit semblant de dormir afin de tout voir et de tout entendre. À chaque instant, des volontaires entraient dans l’appartement où il était couché, lui mettaient presque la chandelle sous le nez pour l’examiner, et disaient en le regardant :

— Quel dommage ! c’est un beau jeune homme. Je ne voudrais pas être à sa place.

— Non, disaient les autres, car notre colonel vient d’avoir la nouvelle que les prisonniers, en arrivant à la ville, seront jugés par la cour martiale et fusillés, une demi-heure après.

M. Masson n’aurait pu s’empêcher de rire parfois, s’il n’avait pas fini par croire que ces volontaires disaient la vérité. Il le crut tellement, que, le lendemain matin, il demanda au colonel Simpson s’il n’y aurait pas moyen de le faire fusiller dans l’enceinte du