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les patriotes

Aux assemblés qui eurent lieu à Saint-Benoît, à Ste.-Scholastique et à Saint-Eustache, dans les mois d’avril, de juin et d’octobre 1837, il fut l’un des orateurs les plus véhéments. À Sainte-Scholastique, il prononça les paroles suivantes : « Ce que je dis, je le pense et je le ferai ; suivez-moi, et je vous permets de me tuer si jamais vous me voyez fuir. »

Il fut un des premiers, dans le comté, à s’habiller d’étoffe du pays des pieds à la tête. Sa parole et ses exemples avaient une grande influence.

Nous avons, en racontant le combat de Saint-Eustache, fait l’éloge de la bravoure de Chénier. Sans doute, il n’avait ni les connaissances militaires ni les forces qu’il fallait pour entreprendre une lutte semblable.

Obligé de prendre le commandement, à la dernière heure, abandonné par les trois quarts de ses partisans, il aurait mieux fait de céder aux instances du curé de la paroisse et de ses meilleurs amis.

Mais il avait juré de ne pas reculer, il voulut tenir parole ; il voulut prouver à ses compatriotes, aux bureaucrates qu’il détestait, qu’un patriote, un Canadien-français savait mourir.

Maintenant, pourquoi n’aurait-il pas espéré jusqu’au dernier moment une de ces victoires étonnantes que des poignées d’hommes, transformés en héros par l’amour de la patrie et de la liberté, remportent quelque fois.

Dans tous les cas, qu’on pense et qu’on dise ce qu’on voudra de l’imprudence, de la témérité de Chénier, une bouche canadienne ne devrait jamais nier sa bravoure, son héroïsme. Car ce serait un mensonge, une injustice et une insulte à l’honneur national.

Tout dans ses dernières paroles, dans ses dernières actions, dénote un homme décidé à mourir en brave.