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les patriotes

Lorimier venait de perdre connaissance ; elle gisait, en ce moment, dans un état de complet évanouissement, dans le cachot de son mari.

« Le confesseur de de Lorimier vint, au commencement de la soirée, et passa quelque temps seul avec lui dans sa cellule ; puis il dit : « courage » aux deux victimes, offrit quelques paroles de consolation à Mme  de Lorimier, et prit congé de tous.

« On nous avaient laissés, les deux condamnés, M. Lévesque et moi, en dehors de nos cellules plus longtemps que d’ordinaire ; à dix heures le geôlier vint nous dire qu’il fallait entrer. C’était le moment que ce pauvre de Lorimier redoutait tant, et que nous aussi, nous voyions venir avec un déchirement de cœur. Quelques parents et amis étaient venus s’ajouter aux trois personnes de la famille qui accompagnaient Mme de Lorimier, et qui devaient être chargées de la pénible mais charitable mission de la reconduire en ville.

« La pauvre jeune femme allait donc dire à son mari un éternel adieu ! À la suite de bien des hésitations, de sanglots et de larmes, elle se jeta à son cou et s’évanouit de nouveau. De Lorimier la souleva dans ses bras et, la tenant comme un enfant qu’on va déposer dans son berceau, il se dirigea vers la porte, les yeux attachés sur cette figure agonisante de la compagne de sa vie. Arrivé sur le seuil, il déposa un baiser sur le front décoloré de sa femme, la remit entre les bras de ses parents, et leur recommanda d’en avoir tous les soins possibles et la porte se referma sur nous.

« De Lorimier me dit, en regagnant l’entrée de notre cachot :

« — Le plus fort coup est donné !… Il était ferme, mais pâle comme la mort.

« Il passa une partie de la nuit en prières et à écrire une lettre qui était comme son testament politique ;