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les patriotes

insulter le peuple, lui ôter ses libertés, et il se laisserait dépouiller de tous ses droits sans rien dire.

« Je marchais de bonne foi avec les loyaux en 1837 et 1838, mais je n’avais pas suffisamment étudié les causes de la rébellion, si je les avais connues, j’aurais eu honte d’adopter ce parti, car je ne suis pas d’opinion que l’on doive se soumettre aux volontés de la couronne quand elles sont trop tyranniques. Je suis heureux de voir que nous devons à cette rébellion les bienfaits d’une constitution semblable à celle de la mère-patrie… »

Inutile de dire que pas un député canadien-français ne se leva alors pour dire ce que des compatriotes dévoyés osent publier de nos jours. Le pays tout entier se serait voilé la face si un seul Canadien-français avait eu l’audace de dénoncer ses frères, quand des étrangers les défendaient avec tant d’éloquence.

M. Papineau prit naturellement la parole ; il dit en terminant :

« Nul autre pays constitutionnel, dans des circonstances semblables à celles où nous avons souffert, n’a été traité avec plus de barbarie. C’est le seul pays au monde où le droit criminel étant en force et les cours de justice accessibles à tous, de nombreux citoyens sans procès, sans le verdict d’un seul corps de jurés, aient perdu la vie et péri sur l’échafaud. Compatriotes infortunés, ils sont tombés victimes innocentes de la haine et des plus mauvaises passions ! Ont-ils cessé pour cela d’être chers à ceux qu’ils ont laissés derrière eux sur le sol de la patrie ? Leur mémoire est chère au peuple canadien et le sera toujours. Ils sont morts en braves comme ils avaient vécu, répétant à l’envie les mots : « Dieu, mon pays et sa liberté. » Il faudrait bien peu de courage moral ou civil pour ne pas applaudir au patriotisme constant dont ils ont donné la preuve la plus éclatante… »

M. Papineau n’avait pas prévu qu’un jour viendrait