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JANVIER 1762

22. — M. Bouchaud[1], agrégé en droit, et auteur d’une traduction du théâtre Italien, fait courir dans les maisons une lettre imprimée, dans laquelle il se défend avec beaucoup d’ardeur d’avoir traduit les Constitutions des Jésuites. Cet ouvrage, presque nul en littérature, n’est ni assez bon pour avoir la crainte délicate d’enlever la réputation du véritable traducteur, ni assez mauvais pour que l’amour-propre se trouve gravement offensé d’une imputation semblable. Il faut qu’il y ait quelque animosité particulière que nous ne pouvons deviner. C’est un différend à vider entre le père véritable et le père putatif, ou qui semble appréhender de l’être.

24. — M. Colardeau[2] avait fait, il y a quelques semaines, une pièce de vers, intitulée : le Patriotisme, à l’occasion des vaisseaux que les différens corps du royaume s’empressent d’offrir au roi. Jusqu’à présent le ministère, toujours sage et modéré, avait enchaîné le zèle de ce poète, en s’opposant à l’impression de son ouvrage. Les mêmes vues de prudence avaient fait sévir la police, au commencement de cette année, en brisant, en pulvérisant quantité d’ouvrages de sucrerie et autres matières, où l’artiste industrieux avait cherché à reproduire sous différentes formes les monumens de la ferveur patrio-

  1. Mathieu-Antoine Bouchaud, né à Paris le 16 avril 1719, mort le 1er février 1804. On a de lui une traduction des Œuvres dramatiques d’Apostolo Zéno ; Paris, 1758, 3 vol. in-12. C’est probablement de cet ouvrage qu’il est ici question. Aucun bibliographe ne mentionne la lettre imprimée dont parlent les Mémoires. On a vu (9 janvier 1762.) que la traduction des Constitutions est de Saboureux de La Bonneterie. Le parlement ayant dénoncé l’ouvrage et manifesté l’intention d’en poursuivre l’auteur, le désaveu de Bouchaud, à qui on l’attribuait, n’a rien d’extraordinaire. — R.
  2. Charles-Pierre Colardeau, né à Janville en Beauce, le 12 octobre 1732 ; mort le 7 avril 1776. — R.