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Page:De Bachaumont - Mémoires secrets Tome 2 - 1766-1769 - Ravenel - Ed. Brissot-Thivars - 1830.djvu/448

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MÉMOIRES SECRETS

et leur répondit : « Si c’est pour vous moquer de moi que vous parlez ainsi, vous êtes trop ; si votre projet est sérieux, vous êtes trop peu. »

2. — Les amateurs de l’opéra apprennent à regret la retraite de mademoiselle Arnould. Il est d’usage qu’on donne aux grands acteurs, outre trois mille livres de fixe, mille livres de gratification, et mille livres encore de gratification extraordinaire. Cette dernière n’a point été accordée à l’actrice dont nous parlons, attendu la fréquence de ses absences et ses incommodités, ses caprices continuels, qui l’empêchaient de jouer les trois quarts de l’année. On lui a démontré que chacune de ses représentations coûtait plus de cent écus à l’Académie royale de Musique. Elle s’est jugée au-dessus des règles ordinaires et de ces calculs ; elle s’est piquée, et enfin elle a quitté. Cette perte très-grande sera moins sensible par les absences dont on vient de parler, qui ont presque habitué le gros du public à s’en passer et à l’oublier ; mais les gens de goût, les cœurs sensibles s’en souviendront longtemps, et ne croient pas qu’on puisse la remplacer pour l’âme et pour l’intelligence.

3. — On a écrit dans des Lettres sur l’état présent de nos Spectacles[1], concernant leur amélioration, que le cinquième acte de l’Iphigénie de Racine ferait un tout autre effet, mis en action et en spectacle, qu’en récit. On en parlait chez la duchesse de Villeroi, qui aime beaucoup la comédie et influe surtout dans le tripot de la Comédie Française. M. de Saint-Foix, présent à la conversation, prétendit qu’il n’y avait rien de plus facile que de faire les changemens nécessaires pour cela ; qu’avec dix ou douze vers de suture on en viendrait à bout. Il fut

  1. Par de La Dixmerie. V. 9 juillet 1765. — R.