Aller au contenu

Page:De Bachaumont - Mémoires secrets Tome 2 - 1766-1769 - Ravenel - Ed. Brissot-Thivars - 1830.djvu/8

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
4
MÉMOIRES SECRETS

Je l’insérai dévotement :
Moitié triste, moitié content
Je le chantais à ma manière.
Mais tel que ces vieux libertins,
Ces invalides de Cythère,
Qui nuls, et même les matins[1],
Se bercent de mille chimères,
Qui voudraient, quoique sans vigueur,
Cueillir cette première fleur
Qu’un vieux pécheur ne trouve guères,
J’aurais voulu tenir de vous
Jusqu’au moindre petit ouvrage,
Pouvoir l’admirer avant tous
Et jouir de ce pucelage.
Ah ! qu’il m’aurait fait de jaloux !
Il m’eût procuré l’avantage
De publier ces vers touchans
Que dévots lisent avec rage,
Avec transport les bonnes gens.
C’est ainsi que chacun raisonne.
Votre muse après soixante ans
Nous plaît encore et nous étonne,
Elle joint aux fruits de l’automne
Les fleurs brillantes du printems.

10. — Il paraît un Mandement de M. l’archevêque de Paris, qui ordonne des services dans cette capitale pour le repos de l’âme de feu M. le Dauphin. On l’admire et l’on est attendri du pathétique qui règne dans cet ouvrage. On raconte à cette occasion que M. l’archevêque s’étant trouvé avec Piron ces jours-ci, lui a demandé ce qu’il en pensait et s’il l’avait lu ; « Non, Monseigneur, a répondu le vieux caustique ; et vous ? »

  1. Ce vers rappelle la réponse de Fontenelle à une dame qui lui demandai
    s’il ne s’était jamais senti le désir de se marier. « Quelquefois, le matin. » — R.