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Page:De Bachaumont - Mémoires secrets Tome 3 - 1769-1772 - Ravenel - Ed. Brissot-Thivars - 1830.djvu/22

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MEMOIRES SECRETS.

n’a pas présumé qu’un jeune homme, un écolier dût lutter contre ses maîtres. Il finit par des phrases pleines d’onction, d’humanité, de bienfaisance sur l’objet de son drame. Les connaisseurs, à ce ton persifleur et philosophique tour à tour, reconnaissent aisément le Protée littéraire, qui se plaît aujourd’hui à prendre tant de formes diverses pour l’instruction du genre humain.

8. — Il est dommage que l’exécution de la fête donnée à Choisy, ces jours-ci, par madame Du Barry n’ait pas répondu à sa magnificence. Les Comédiens Italiens ont joué un opéra-comique nouveau, intitulé Alix et Alexis. Les paroles sont de dom Antonio Poinsinetto, aujourd’hui directeur d’une troupe de Comédiens de Sa Majesté Catholique, et la musique est de M. de La Borde, premier valet de chambre du roi. Ce drame, qui n’avait encore paru que sur le théâtre de mademoiselle Guimard, et qui pouvait être digne du lieu, n’était pas fait pour être joué à la cour. La musique, excellente pour un amateur, ne peut lutter contre celle de nos grands maîtres d’aujourd’hui. Ce qu’on a le mieux goûté, c’est le vaudeville de la fin, dont un nommé Prieur, jeune homme de talent, a refait les paroles.

9. — Un sujet de l’Opéra, très-précieux au public dans son genre, excite les craintes de le perdre. Mademoiselle Guimard, dont les talens pour la danse font les délices des amateurs, est à la veille, dit-on, de faire banqueroute. On assure que M. le maréchal prince de Soubise lui retire les deux mille écus par mois dont il la gratifiait ; ce qui fait un objet de soixante-douze mille livres de rentes de moins par an, indépendamment des cadeaux particuliers. M. de La Borde est ruiné et ne peut plus contribuer aux amusemens de cette nymphe que par son goût et sa