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Page:De Bachaumont - Mémoires secrets Tome 3 - 1769-1772 - Ravenel - Ed. Brissot-Thivars - 1830.djvu/91

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DÉCEMBRE 1769.

3 Décembre. M. le lieutenant-général de police a prié, il y a quelques jours, par un billet fort honnête M. Bouvard de passer chez lui à l’heure de sa commodité. Ce médecin s’y est rendu et a affecté de croire que monsieur ou madame de Sartine étaient malades. Sur la déclaration du premier qu’il n’était pas question de cela, mais d’un libelle sanglant dont se plaignait M. Petit, son confrère, le docteur a eu une longue explication, d’où il est résulté que M. Petit était l’agresseur, que l’autre n’avait fait que répliquer, qu’il tenait sa défense légitime et même indispensable ; qu’au surplus, il ne se regardait pas comme le justiciable de M. le lieutenant-général de police ; il a refusé d’entrer en aucun accommodement à cet égard avec son confrère. Alors le magistrat lui ayant signifié qu’il allait user de son autorité pour supprimer son livre. M. Bouvard a pris congé de lui, est allé sur-lechamp chez son libraire, a retiré tous les exemplaires restans, et quand on est venu pour exécuter les ordres de la police et saisir l’ouvrage, on n’a rien trouvé.

Ce petit véhicule fait merveilleusement bien à ces Lettres[1], qui jusqu’ici n’avaient été lues et recherchées que par les gens de l’art : aujourd’hui toutes les femmes et les gens les plus frivoles veulent les avoir, par l’éclat que fait dans le monde l’aventure qu’on vient de raconter.

5. — En 1753, un jeune élève de l’école militaire de Berlin, nommé Mingard, agé de seize ans, curieux d’assister au spectacle du roi, écrivit à M. de Voltaire, alors en Prusse et dans la confiance du prince, le billet suivant :


Ne pouvant plus gourmander
Le désir ardent qui m’anime,

  1. V. 17 novembre 1769. — R.