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Page:De Bachaumont - Mémoires secrets Tome 3 - 1769-1772 - Ravenel - Ed. Brissot-Thivars - 1830.djvu/98

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MEMOIRES SECRETS.

parterre s’enthousiasmait sur la danse vigoureuse et hardie de mademoiselle Asselin, une des coryphées du théâtre lyrique. Son voisin la déprimait, au contraire, et la trouvait détestable. Chacun soutenait son avis avec opiniâtreté et y resta suivant l’usage. À la dernière reprise, le détracteur de la danseuse s’écria qu’il fallait être bien bête pour l’admirer. Son adversaire lui dit : « Jusqu’ici, Monsieur, j’ai cru que c’était à mademoiselle Asselin que vous en vouliez : je vois très-bien à présent que c’est à moi, et vous allez m’en faire raison. » Ils sortent, ils se battent, sans s’être jamais connus ni vus qu’en ce moment, et l’agresseur reste mort sur la place. Il se trouve, par les informations, que c’est un M. Hooke, officier, parent d’un Hooke connu par une aventure à peu près semblable, qui lui arriva au concert spirituel, qui fit beaucoup de bruit dans le temps, et qui ne s’est terminée qu’après plusieurs combats arrivés en divers endroits entre les deux contendans. Au surplus, cette catastrophe relève merveilleusement la réputation de mademoiselle Asselin. Toutes ses camarades la regardent avec envie et voudraient bien compter dans les fastes de leur histoire quelques combats singuliers cette espèce.

— Les Comédiens Italiens ont donné hier la première représentation de la Rosière ou la Fête de Salency, pièce en trois actes et en prose, mêlée d’ariettes et vaudevilles sur des airs connus. Cette comédie, qui paru de beaucoup trop longue, n’a pas fait plus de fortune à Paris qu’à la cour[1]. Le premier acte a été mieux reçu que les deux autres. L’intrigue est minutieuse embarrassée ; les caractères ne sont ni assez développés,

  1. V. 29 octobre 1769. — R.