Page:De Banville - Les Stalactites.djvu/85

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D’autres regretteront, devant cette richesse,
Les pourpris que l’Aurore arrose de ses pleurs,
Le gazon aplani pour des pieds de duchesse,
Et le rose printemps des oiseaux et des fleurs ;

Et de ne plus revoir, au soleil d’or qui baise
Les grands coquelicots, orgueil mouvant des blés,
Les gammes de Rubens et de Paul Véronèse
Tourbillonner en chœur devant leurs yeux troublés.

Mais moi, j’aime à songer devant cette harmonie,
Et toutes les blancheurs des rêves anciens
Mettent d’accord leurs voix pour une symphonie,
Et leur rhythme plaintif me prend dans ses liens.


II

C’est dans le mol oubli d’un ciel douteux et pâle
Qui donne à toute chose un prestige charmant,
Et qui passe en douceur le duvet et l’opale,
Que le drame du jour s’agite vaguement.

Leurs six ailes au vent, pareilles à des voiles,
Les Anges sont épars dans les chemins du ciel ;
Les nuages rêveurs font la cour aux étoiles,
Et tout l’éther frémit d’un amour sensuel.