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Page:De Coster - Contes brabançons, 1861.djvu/76

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maison. Un homme était là qui vidait un verre de cassis. Au moment où se fermait la porte cochère, il mit quelque monnaie sur le comptoir et sortit du cabaret. Il portait des lunettes, sa face était bouffie et blanche comme de la craie, sa redingote graisseuse était trop longue, son chapeau pelé, ses pantalons étaient trop courts et ses souliers avachis. — Il tira de sa poche un petit livre relié en basane et suivit Anna en ayants soin de lever de temps en temps les yeux de dessus le livre. Ils arrivèrent ainsi au marché du Vendredi. Braf cependant avait fait lever une troupe de moineaux, il se lança à leur poursuite ; l’homme au bouquin était sur son chemin, il le renversa, l’homme jeta les hauts cris, appela la garde, se releva et regarda d’un air courroucé et mélancolique, son chapeau, son bouquin et sa canne qui gisaient dans la boue. Braf était déjà loin, des gamins s’assemblèrent autour de l’homme et le huèrent.

Il n’eut pas le courage de paraître se soucier de ces huées, il remit sa canne sous son bras, se recoiffa, chercha un refuge dans un débit de liqueurs voisin et demanda un verre de cassis.

Puis il tira de sa poche un foulard de coton, s’en servit pour enlever la boue du livre relié en basane et dit en le voyant si maculé : Ô noble Horace on t’a crotté bien irrévérencieusement !