Page:De Gaspé - Les anciens canadiens, 1863.djvu/27

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’autre de quatorze, cette amitié, qui sera exposée, par la suite, à des épreuves bien cruelles.

— Voici une lettre de ma mère, dit Jules, dans laquelle il y a un mot pour toi : « J’espère que ton ami, M. de Locheill, nous fera le plaisir d’accepter l’invitation de ton père. Nous avons tous grande hâte de faire sa connaissance. Sa chambre est prête, à côté de la tienne. Il y a dans la caisse, que José te remettra, un paquet à son adresse, qu’il me peinerait beaucoup de refuser : je pensais en le faisant à la mère qu’il a perdue.» La caisse contenait une part égale, pour les deux enfants, de biscuits, sucreries, confitures et autres friandises.

Cette amitié, entre les deux élèves, ne fit qu’augmenter de jour en jour. Les nouveaux amis devinrent inséparables ; on les appelait indifféremment, au collége, Pythias et Damon, Pylade et Oreste, Nysus et Euryale : ils finirent par se donner le nom de frères.

De Locheill, pendant tout le temps qu’il fut au collége, passait ses vacances à la campagne, chez la famille d’Haberville, qui ne semblait mettre d’autre différence, entre les deux enfants, que les attentions plus marquées qu’elle avait pour le jeune Écossais, devenu, lui aussi, le fils de la maison. Il est donc tout naturel qu’Arché, avant son départ pour l’Europe, accompagnât Jules dans la visite d’adieux qu’il allait faire à ses parents.

L’amitié des deux jeunes gens sera mise, par la suite, à des épreuves bien cruelles, lorsque le code d’honneur, que la civilisation a substitué aux sentiments plus vrais de la nature, leur dictera les devoirs inexorables d’hommes combattant sous des drapeaux