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LA DÉBACLE.

qui l’étouffait, vomit trois ou quatre gorgées d’eau, respira bruyamment et dit :

— Il n’est pas mort ; il ne peut être qu’asphyxié ; il vivait il y a une minute à peine.

On se hâta de transporter Dumais au manoir seigneurial où des soins empressés et entendus lui furent prodigués. Au bout d’une demi-heure, des gouttes d’une sueur salutaire perlèrent sur son front, et à l’expiration d’une autre demi-heure, il rouvrait des yeux hagards, qu’il promena longtemps autour de lui et qui se fixèrent enfin sur le vieux curé. Celui-ci approcha son oreille de la bouche de Dumais, et les premières paroles qu’il recueillit furent : ma femme ! mes enfants ! monsieur Arché !

— Soyez sans inquiétude, mon cher Dumais, dit le vieillard : votre femme est revenue de son évanouissement, mais comme elle vous croit mort, il me faut de grandes précautions pour lui annoncer votre délivrance : tant d’émotions subites pourraient la tuer. Aussitôt qu’il sera prudent de le faire, je l’amènerai près de vous ; je vais l’y préparer. En attendant, voici M. de Locheill, à qui, après Dieu, vous devez la vie.

À la vue de son sauveur, qu’il n’avait pas encore distingué des autres assistants, il se fit une réaction dans tout le système du malade. Il entoura Arché de ses bras, et pressant ses lèvres sur sa joue, des larmes abondantes coulèrent dans ses yeux.

— Comment m’acquitter envers vous, dit-il, de ce que vous avez fait pour moi, pour ma pauvre femme et pour mes pauvres enfants !

— En recouvrant promptement la santé, dit gaiement de Locheill. Le seigneur de Beaumont a fait