Page:De Gaspé - Mémoires. 1866.djvu/331

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depuis le bas des épaules jusqu’aux coudes, mitasses de la plus brillante écarlate, souliers de chevreuil richement ornés de porc-épic, chemise de soie aux couleurs variées, ouverte sur la poitrine et chargée de médailles d’argent, dont une à l’effigie du roi George III, et enfin chapeau de castor chargé de superbes plumes. Deux cercles d’argent, de quatre pouces de diamètre, tombant sur leurs épaules, en guise de boucles d’oreilles, complétaient leur toilette.

Le maintien des deux Hurons offrait, pendant tout le repas, un contraste aussi différent du nôtre que leur costume. Froids et réservés au milieu de nos joyeux ébats, jamais un sourire n’effleurait leurs lèvres. Quoique ce ne fût pas alors l’usage de débiter au dessert des discours à tuer toute gaieté, comme on le fait aujourd’hui, notre amphitryon pria Plamondon de prononcer une harangue parlementaire ; c’était un plat dont nous étions tous très friands qu’un tel discours dans la bouche de notre spirituel et sarcastique ami : nous connaissions d’avance tous ceux qu’il allait immoler.

Plamondon se leva et dit avec un accent gascon très prononcé : « M. le président, je vais vous entretenir ce soir de la constitution dont et de laquelle nous avons le bonheur de vivre dessous, » et continuant sur ce ton, il débita le discours le plus baroque qui ait jamais dilaté la rate de joyeux vivants. Après avoir payé ce tribut aux mânes d’un défunt membre du parlement provincial, dont la mémoire était encore récente parmi nous, il demanda la permission de réfuter le