Page:De Gaspé - Mémoires. 1866.djvu/351

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colonel Vassal[1] qui m’a raconté cette scène à laquelle il avait assisté.

Je suis redevable à mon ami le major Lafleur d’une autre anecdote qui tend à prouver que sir James n’était pas si diable qu’on l’a prétendu, mais même que, malgré la hauteur qu’on lui attribuait, il était accessible à toutes les classes de la société.

Un nommé Bellehumeur, que j’ai très bien connu, sollicite une audience du gouverneur Craig et est aussitôt présenté par l’aide de camp de service. C’était un grand vieillard à la démarche fière et décidée.

— Quel est votre nom ? lui dit sir James, et que me voulez-vous ?

— Mon nom est Bellehumeur : je suis très-vieux, incapable de gagner ma vie ; et je prie Votre Excellence de me faire placer parmi les infirmes de l’hospice de l’Hôpital-Général.

Sir James frappé de son air martial lui demanda s’il avait servi.

— J’étais, Excellence, grenadier dans le régiment de Berry lors de la conquête ; un crâne de régiment, allez, je m’en vante ! Des lurons qui n’avaient pas froid aux yeux !

— Vous avez alors tué plusieurs anglais ? fit sir James.

— Autant que j’ai pu, Excellence ; un pauvre diable de soldat fait de son mieux ; et je n’ai pas, Dieu merci, de reproches à me faire de ce côté-là.

  1. Le Colonel François Vassal de Monviel, créé Adjudant-Général de la milice en 1812.