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la chouette et la colombe.

états ! on veut donc me forcer d’abdiquer ?… je ne dois pas souffrir ça. Suivez-moi, gardes !

Ganachini sort avec Bouriquet et les gardes ; le singe saute sur le dos de Ganachini et sort avec lui.

SCÈNE X.

LA CHOUETTE, VIOLENTINE, DROMADAIROS.
la chouette.

Maintenant qu’on me donne un grand fauteuil.

DROMADAIROS.

Un fau… fau… auteuil.

VIOLENTINE.

Prenez le siège de mon mari ; pour une magicienne il n’y a rien de trop beau.

DROMADAIROS.

Vous serez… jooliment bien… il est é… élas… élastique.

LA CHOUETTE, se plaçant.

Que l’un se place à ma droite… l’autre à ma gauche, et ne bougez pas surtout… à moins que vous ne vouliez être changés en melons.

VIOLENTINE.

Ne parlons pas de melons… ça me rappelle mon époux.

DROMADAIROS.

Je ne boubou… boououge plus !

La Chouette fait des conjurations avec sa baguette, elle touche Dromadairos et Violentine ; le théâtre devient sombre.
VIOLENTINE.

Tiens, voilà le gaz qui s’éteint.

DROMADAIROS.

On n’y voit plus du tout.

VIOLENTINE.

Je commence à avoir peur.

LA CHOUETTE.

Seigneur Dromadairos, tu as vu passer un jour d’une fenêtre du palais une jeune paysanne charmante ; depuis ce temps tu l’as cherchée en vain et tu en es éperdument amoureux ; voilà le motif de ta tristesse.

DROMADAIROS.

Elle a de… de… deviné !

LA CHOUETTE.

Eh bien ! cette jeune fille se nomme Pâquerette ; elle habite une petite chaumière près du moulin, au bord de la rivière… Enlève cette fille, tâche de te faire aimer d’elle, et tu deviendras aussi beau que tu es laid.

DROMADAIROS.

Ah ! quel bo… bo… quel bonheur !

LA CHOUETTE.

Toi, Violentine, tu as vu en songe un jeune pâtissier qui te faisait des yeux séducteurs ; ce pâtissier existe, il se nomme Feuilleté.

VIOLENTINE.

Il existe !… dans quel climat ?

LA CHOUETTE.

Empare-toi d’abord de la personne de Paquerette, et puis il te sera facile de découvrir le jeune pâtissier.

VIOLENTINE.

Merci, bohémienne, merci ! Mon pâtissier existe… ah ! quelle galette je vais lui commander !

Ganachini rentre de la droite avec ses gardes, Bouriquet et Gogo.

SCÈNE XI.

Les Mêmes, GANACHINI, BOURIQUET, GOGO, GARDES.
GANACHINI.

Victoire ! les dindons sont revenus !… j’en étais sûr… nous n’avons eu qu’à nous montrer. Ah ! ah ! la bohémienne est encore ici ? (À Violentine.) Eh bien ! chère amie, êtes-vous contente de ses prédictions ?

VIOLENTINE.

Enchantée.

GANACHINI.

Puisqu’il en est ainsi, je veux faire une politesse à cette vieille femme. Vieille femme, je vous fais l’honneur de vous inviter à dîner. (Silence.) Eh bien : qu’est-ce qu’on dit ?… merci qui ? Comment, malhonnête, tu abuses de ton sexe pour me faire une grossièreté… et sur mon siège encore !… veux-tu bien vite descendre de la ! (Il court à elle et veut la prendre par le bras ; il ne trouve plus que le vêtement de la bohémienne ; une choueue s’en échappe en poussant un grand cri. Ganachini recule épouvanté.) Ah ! mon Dieu ! qu’est-ce que c’est que ça ?

VIOLENTINE.

C’était une fée.

TOUS.

Une fée !

VIOLENTINE.

Je ne m’étonne plus si elle devine tout… l’amour de mon frère, le mien.

GANACHINI.

Votre amour ! vous êtes amoureuse ?

VIOLENTINE.

Ça ne vous regarde pas. La fée a deviné que mon frère adore une petite paysanne nommée Pâquerette ; elle ordonne que nous allions la lui chercher ; partons.

GANACHINI.

Mais si nous soupions avant ?…

VIOLENTINE.

Silence ! la fée m’a appris qu’après avoir découvert Pâquerette, nous trouverions un certain Feuilleté qui est le plus fameux pâtissier de vos états…

GANACHINI.

Comment ! il y a un excellent pâtissier dans mes états et je ne le connais pas encore ! c’est pitoyable… Je ne connais pas l’état de mes états !… Je veux sur-le-champ aller goûter de ses