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Page:De La Nature.djvu/36

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indignement outragée, la fraude & l’ambition qui s’efforcent de régler le sort des empires, la mer qui, devenue l’esclave de l’avidité d’une seule nation, n’ose presque plus porter d’autres vaisseaux que les siens, les deux mondes enfin en proie à une guerre barbare, déposeront contre lui.

Ô hommes ! Consolez-vous des miseres attachées à votre condition, par la jouissance des plaisirs, dont votre infortune même vous fait une loi. Apprenez à vous défier de la vertu de vos semblables, & à supporter leur corruption ; en quoi consiste la perfection de la philosophie, si elle n’est pas une chimere.

CHAPITRE II

De l’essence & de l’existence d’une cause.[1]


Tout est cause ou effet. Disons mieux : une seule chose est cause, tout le reste est effet.

  1. Il est à croire que l’ignorance des causes physiques a fait naître la premiere pensée de recourir à une cause finale. Mais il y a plus que de l’ignorance à la rejeter tout-à-fait. Probablement si l’esprit humain avoit toujours pu se répondre de découvrir la raison physique ultérieure des choses, il ne se feroit point contenté d’une cause peu satisfaisante pour un Philosophe. La Volonté d’un premier Etre n’a rien de physique, & il n’y a recouru qu’à regret. Sa répugnance est raisonnable : car c’est là que doivent finir ses recherches, & aboutir ses raisonnemens. Cependant, s’il n’y a pas une progression infinie de causes & d’effets, il faut qu’il y vienne tôt ou tard. Il est vrai aussi qu’en bonne Philosophie, on ne doit recourir à la cause finale, que lorsqu’on peut croire raisonnablement avoir épuisé toute la série des causes secondes.