— Tu es en verve aujourd’hui, Bernardo ? Écoute, il me faut encore une poésie…
— D’amour ?
— Oui. Et passionnée…
— Pour la duchesse ?
— Non. Mais prends garde, ne trahis pas !
— Oh ! seigneur, vous m’offensez. Est-ce que jamais…
— Bien, bien.
— Je suis muet, muet comme un poisson !
Bernardo cligna mystérieusement des yeux.
— Passionnée ? Suppliante ou reconnaissante ?
— Suppliante.
Le poète fronça les sourcils d’un air important.
— Mariée ?
— Non.
— Ah !… Il faudrait le nom…
— Pourquoi faire ?
— Pour une supplique, le nom est nécessaire.
— Madonna Lucrezia. Tu n’as rien de prêt ?
— Si, mais vaut mieux quelque chose de neuf. Permettez-moi de passer un instant dans la pièce voisine. Je sens l’inspiration ; les rimes assiègent mon cerveau !
Un page entra et annonça :
— Messer Leonardo da Vinci.
S’emparant d’une plume et de papier, Bellincioni se glissa par une porte, tandis que Léonard entrait par l’autre.