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Page:De Merejkowsky - Le Roman de Léonard de Vinci, 1907.djvu/133

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Mais maintenant, devant la Madone, cet argument lui parut subtil et il termina sa prière :

« Si j’ai commis un péché ou viens à le commettre, tu sais, Reine des cieux, que je ne le fais que dans l’intérêt de mon peuple et de l’Italie. Intercède donc pour moi auprès de Dieu, et je glorifierai ton nom par la construction splendide de la cathédrale de Milan, celle de la basilique de Pavie et autres nombreuses donations. »

Ayant terminé sa prière, il prit un cierge et se dirigea vers sa chambre à travers les couloirs sombres du palais endormi. Dans l’un d’eux, il rencontra Lucrezia.

— Le dieu d’amour me protège ! songea le duc.

— Seigneur ! murmura la jeune fille en s’approchant de lui.

Sa voix tremblait. Elle voulut s’agenouiller devant lui. Il la retint.

— Seigneur, pitié !

Lucrezia lui confia que son frère, Matteo Crivelli, principal camérier de la Cour des Monnaies, homme dissipé, mais qui l’aimait tendrement, avait perdu au jeu l’argent du fisc.

— Tranquillisez-vous, madonna ! Je délivrerai votre frère.

Puis, après un instant de silence, il ajouta :

— Ne consentirez-vous pas aussi à n’être pas cruelle ?

Elle le regarda avec des yeux timides et naïfs.

— Je ne comprends pas, seigneur ?…