Page:De Merejkowsky - Le Roman de Léonard de Vinci, 1907.djvu/14

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dans les rues, en criant : « Voilà Grillo, Grillo le sorcier, le petit-fils de la sorcière ! Tous les deux ont vendu leur âme au diable ! » Le croiriez-vous ? la nuit même je n’étais pas tranquille : il me semblait voir continuellement cette main de marbre s’avancer vers moi ; je la sentais me prendre doucement par le cou comme pour me caresser de ses doigts longs et froids et, tout à coup, me saisir à la gorge pour m’étrangler. Je voulais crier et je ne le pouvais. Eh ! songeais-je, la plaisanterie a assez duré ! Un jour donc je me levai avant l’aube et pendant que ma grand’mère cueillait ses herbes, je brisai le cadenas de son alcôve, je pris la main et je vous l’apportai. L’antiquaire Lotto m’en offrait dix sous et je ne reçus que huit de vous ; mais pour Votre Excellence, nous ne regrettons rien. Que le Seigneur vous envoie tous les bonheurs, à vous, à monna Angelica, à vos enfants et à vos petits-enfants.

— Oui ! murmura messer Cipriano pensif. D’après ce que tu racontes, Grillo, nous trouverons quelque chose dans la colline du Moulin.

— Pour trouver, nous trouverons, continua le vieux en soupirant. Seulement… pourvu que le père Faustino n’en ait vent ! S’il apprend notre projet, il m’étrillera et vous gênera aussi en ameutant les habitants. Espérons en Dieu clément. Mais ne m’abandonnez pas mon bienfaiteur ; dites un mot en ma faveur au juge…

— Au sujet de la terre que te dispute le meunier ?

— C’est cela même. Le meunier est un malin