barbiche avaient fonci. Le nez allongé rappelait le bec d’un oiseau de proie. Mais une parfaite sérénité se dégageait de ce visage impassible. Seulement maintenant il avait une expression de plus impétueuse hardiesse que jamais, une terrifiante finesse aiguë comme la lame aiguisée d’une épée nue.
L’artillerie, la meilleure de toute l’Italie, suivait le duc. Attelés de bœufs, les fines couleuvrines, les fauconneaux, les basilics, les gros mortiers en fonte roulaient, mêlant leur fracas aux sons des trompes et des timbales. Sous les rayons pourpres du soleil couchant, les canons, les cuirasses, les morions et les lances s’allumaient comme des éclairs, et il semblait que César marchait dans la pompe royale du soir d’hiver, comme un triomphateur, directement vers le soleil énorme et sanglant.
La foule contemplait le héros, silencieuse, recueillie, désireuse de l’acclamer et craignant de le faire, plongée en une dévotieuse terreur. Des larmes roulaient sur les joues de la vieille mendiante.
— Sainte Vierge et saints martyrs ! balbutiait-elle en se signant. Tout de même le Seigneur m’a permis de voir ton visage… Ô notre beau soleil !
Et le glaive scintillant confié par le pape à César pour la défense de l’Église lui apparaissait tel le glaive même de l’archange Michel.
Léonard sourit en remarquant chez Nicolas la même expression de naïf enthousiasme.