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la résignation

détrompé à la vue d’une rivale préférée — se tournerait vers lui sans partage.

Il marcha quelque temps, l’oreille au guet ; puis sentant toujours la jeune fille immobile sur son épaule, il la déposa à terre et tenta de la ranimer. Hélas ! il avait peu de moyens dans cette solitude, au milieu de la nuit.

Agenouillé auprès du corps inerte, regardant désespérément autour de lui, il aperçut à une faible distance, un bosquet de sapin, et s’élança de ce côté, se retournant à chaque pas, comme s’il eût craint qu’on profitât de ce court moment pour lui enlever le cher trésor sur lequel il s’était imposé la tâche de veiller. Saisissant son poignard, il détacha une ampoule de sève puis revenu auprès de la Source, il entrouvrit sa robe, rapprocha les lèvres de la blessure, et y appliqua une épaisse couche de gomme liquide sur laquelle il pressa une poignée de mousse. Le pansement arrêta l’hémorragie. Comme le brave garçon était occupé à cette pieuse besogne, une ombre glissa derrière lui. Le Carcois se retourna aussitôt en mettant la main à sa hache ; mais, ne voyant qu’une pauvre vieille qui portait une charge d’herbes, il se calma.

La pauvresse demanda simplement en regardant le jeune homme : « C’est ta femme » ?

— « Non, fit-il d’un signe ».

— « Ta sœur ».

— « Non, répondit-il encore ».