Page:De Pisan - Œuvres poétiques, tome 1.djvu/93

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée


XLII



Ovide dit qu’il est un messagier,
Qui en dormant les nouvelles aporte,
Les gens endort, et puis les fait songier
De joye ou dueil, songes de mainte sorte.
Morpheüs cil messager on appelle ;
Au dieu qui dort est filz, ce dit la fable,
Qui en pluseurs formes se renouvelle,
Cil nonce aux gens mainte chose notable,

Et cellui dieu de someil alegier,
Soye mercy, veult le mal que je porte.
Car nouvelles m’envoye sanz dongier
De mon ami, autre ne me conforte.
Mais quant chose me dit qui ne m’est belle,
Mon cuer tremble plus que feuille d’arable
Car en nul cas de riens le voir ne celle,
Cil nonce aux gens mainte chose notable.

Et ma doulour fait moult assouagier
Le dieu qui dort, certes je fusse morte
Se il ne fust ; mais plorer de legier
Me fait souvent, car trop me desconforte
Quant il me dit qu’une autre damoiselle
Tient mon ami, et qu’il soit veritable
J’ay grant paour ; car, de toute querelle,
Cil nonce aux gens mainte chose notable.