Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, Curet, 1810.djvu/190

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vents orageux ou de tonnerre, n’ont que l’écorce de perle, sans aucune substance ; et toutes les vertus et les plus grandes qualités d’un homme qui les enfle de son orgueil et de sa vanité, n’ont que la simple apparence du bien, sans aucune solidité. L’on a raison de comparer les honneurs au saffran, qui se fortifie, et qui vient plus abondamment quand il a été foulé aux pieds. Une personne qui est fière de sa beauté, en perd la gloire ; et celle qui la néglige, lui donne plus d’agrément. La science déshonore dès qu’elle nous enfle l’esprit, et elle dégénère en une ridicule pédanterie. Quand le Paon veut se donner le plaisir de voir ses belles plumes, il se hérisse tout le corps, et en découvre ce qui est le plus difforme et le plus hideux.

Si nous sommes pointilleux pour des préséances, pour des rangs et des titres, outre que nous aurons le chagrin de faire examiner nos qualités et de les voir contestées, nous les rendrons encore méprisables ; car, comme il n’y a rien de plus beau que l’honneur, quand on le reçoit comme un présent, il n’y a rien aussi de plus honteux, quand on l’exige comme un droit. Il est semblable à une belle fleur qu’il ne faut ni cueillir ni toucher, à moins qu’on ne la veuille flétrir. L’on dit que la Mandragore jette de loin une odeur fort douce ; mais que ceux qui veulent la sentir de près et long-temps sont frappés d’une