Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, Curet, 1810.djvu/20

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une affection spéciale, de certains épis plus remarquables et plus choisis que les autres. Qui ne sait que Timothée, Tite, Philémon, Onésime, sainte Thècle et Appia, étoient les chers enfans du grand saint Paul, comme saint Marc et sainte Pétronille de saint Pierre ; sainte Pétronille, dis-je, qui ne fut pas sa fille selon la chair, mais selon l’esprit, ainsi que Baronius et Galonius le prouvent savamment ? Et saint Jean n’écrit-il pas une de ses Épîtres canoniques à la dévote Dame Électa ?

C’est une peine, je le confesse, de conduire les âmes en particulier, mais une peine semblable à celle des moissonneurs et des vendangeurs, qui ne sont jamais plus contens, que quand ils sont plus chargés et plus occupés. C’est un travail, lequel délasse et fortifie le cœur par la suavité qui lui en revient, comme il arrive dans l’Arabie heureuse à ceux qui portent le Cinnamome. On dit que la tigresse ayant retrouvé un de ses petits, que le chasseur laisse sur le chemin pour l’amuser, tandis qu’il emporte les autres, elle s’en charge, quelque gros qu’il soit, pour le porter promptement dans sa tanière ; et que bien-loin d’en être plus pesante à la course, l’amour naturel pour son fardeau la soulage et lui donne plus d’agilité. Combien plus volontiers un cœur paternel se chargera-t-il de la conduite d’une âme qu’il aura trouvée dans un vrai désir de la sainte perfection ? semblable à une mère qui porte son enfant en son sein, sans se ressentir d’un poids qui lui est si cher.

Mais il faut sans doute que ce soit un cœur paternel : et c’est de la que les Apôtres et les hommes