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du Pais de Liége

Il donna enſuite ſes ſoins à la réformation des abus, que le peu d’atention de ſes Prédéceſſeurs avoit laiſſé introduire dans l’adminiſtration de la Juſtice, & de la Police.

Soit que l’Egliſe Epiſcopale, bâtie par Hubert, menaçât une ruine prochaine ; ſoit qu’elle ne parut point à Notger aſſés vaſte, pour le nombre des Chanoines, dont il vouloit compoſer le Chapitre, il la fit abatre, & fit bâtir celle que l’on voit aujourd’hui.

    ce lieu, qui étoit déja très-fort par ſa nature. Il y entretenoit une nombreuſe Garniſon avec laquelle il tenoit tout le Païs en reſpect, ou ſi l’on veut, avec laquelle il mettoit, lorſqu’il lui plaiſoit, le Païs à contribution.

    Il pouvoit ataquer, & ataquoit impunément, & n’apréhendoit point d’être forcé dans ſa retraite ; c’étoit en un mot une eſpèce de Tiran, qui incommodoit beaucoup la Ville & la Campagne, & qui par ſes exactions s’étoit rendu odieux aux Grands & aux Petits.

    On avoit pluſieurs fois inutilement tenté de le déloger de ce retranchement ; Notger, ennemi de la tiranie, atendoit depuis long-tems une ocaſion favorable pour ſe défaire du Tiran, & raſer ſa place ; elle ſe préſenta, il ne la laiſſa point échaper.

    Ce Seigneur n’avoit point d’enfant ; ſa femme lui donna un fils, ce qui lui donna lieu de prier Notger d’adminiſtrer le Bâtême à ce nouveau-né. Le Prélat acorde ſur le champ la demande, & ajoute, que pour rendre la Cérémonie plus pompeuſe, il ſe fera acompagner de ſon Clergé ; il indique le jour de ſon arrivée, le Seigneur très-ſatisfait de cette politeſſe prit toutes les meſures poſſibles pour rendre cette fête brillante.

    L’Evêque de ſon côté, fait venir dans ſon Palais des gens de guerre de confiance, leur communique le deſſein qu’il a de faire mourir le Tiran, & de raſer la Fortereſſe, leur ordonne de tenir prêt, pour un autre jour que celui qu’il avoit marqué au Seigneur, un certain nombre de Soldats armés de toutes pieces, de les amener au Palais, pour les revêtir d’habits Ecléſiaſtiques, ſous prétexte d’aller en proceſſion juſqu’à Chervremont ; afin qu’au premier ſignal qu’il doit leur donner, ils mettent tout à feu & à ſang.

    La choſe s’exécuta au gré de l’Evêque. La Proceſſion partit le jour qui précédoit celui qu’il avoit marqué pour la Cérémonie du Batême. Lorſqu’elle fut à une certaine diſtance de la Fortereſſe, il fit annoncer ſon arrivée au Seigneur, qui ſortit à l’instant avec tous ſes gens, pour aller au devant de l’Evêque & de ſon prétendu Clergé. Occurrit ſtatim Miles, cum omni populo ſuo, Epiſcopus devotè ſuſcipitur, & cum ſuo comitatu Caſtrum illud introducitur.

    A peine fut-on entré, que Notger donna le ſignal, auquel tous les faux Chanoines jétant bas leurs habits de Chœur, firent main baſſe ſur tout ce qui ſe préſenta, paſſérent au fil de l’épée, ſans distinction de ſexe ni d’âge, toutes les perſonnes qui étoient dans la place, & la raſérent de même que les Egliſes qui étoient dans ſon enceinte : il faut entendre Anſelme.

    Sed ut compendiosè loquar, priùſquam reſiderent, mutato repentè fortunæ caſu, ad edictum Præſulis, abjicitur habitus clericalis, mutatur in militem Clerus ille mirabilis, parent in loricis, qui tetris priùs latebant ſub cappis. Muniuntur