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Les Délices

qu’il y a de plus triſte, c’eſt qu’on ignore encore aujourd’hui l’Epoque de ſa fin, de même que celle de ſa mort. Tout ce que l’on ſait, eſt qu’il eut pour ſucceſſeur George d’Autriche, qu’à ſa recommandation le Chapitre avoit élû pour ſon Coadjuteur.

Pendant treize ans, que ce dernier gouverna l’Egliſe de Liége, il fit à l’exemple de ſes Prédéceſſeurs, tout ce qui dépendoit de lui, pour empêcher que l’Héréſie n’infectât ſon Diocéſe, & pour rétablir la diſcipline Ecléſiaſtique. Sa douceur naturelle, & ſa grande bonté, rendirent ſon regne tranquile & pacifique. L’hiſtoire n’aprend rien de plus, ſinon qu’il fut fort ataché à la Maiſon, dont il portoit le nom, & qu’il mourut, comme il avoit vécu, dans une très-grande tranquilité. Ce fut l’an mil cinq cent cinquante-ſept.

Son Succeſſeur Robert de Bergues avoit toutes les qualités néceſſaires pour former un excellent Evêque. Il étoit d’une vertu conſommée & d’une profonde érudition. Les Lettres d’Inveſtiture, qui lui furent acordées par l’Empereur Ferdinand, font ſon éloge. Un accident extraordinaire l’empêcha de faire à l’Egliſe & à l’Etat, le bien qu’ils devoient naturellement atendre. Il leur en fit un très-conſidérable, en ſe deſignant un Coadjuteur, & en ſe dépoüillant du gouvernement en ſa faveur, auſſitôt qu’il fut en ſituation de pouvoir les gouverner. Quelque peſant que ſoit le fardeau de la Souveraineté, l’hiſtoire fournit peu de Princes qui s’en ſoient déchargés volontairement, & ſur tout en faveur des perſonnes qui ne leur étoient point aliées par le ſang. Celle de Liége fournit en la Maiſon de Bergues deux de ces exemples, preſque inoüis juſqu’alors. Robert de Bergues mourut au commencement de l’an mil cinq cent ſoixante-cinq.

La propoſition que Robert de Bergues fit au Chapitre d’élire Gerard de Groesbeck, & l’aſſurance qu’il lui donna que l’on ne pouvoit jéter les yeux ſur un plus digne Sujet pour remplir le Siége Epiſcopal, ſont des preuves invincibles de la bonté, & du diſcernement de ce Prince pieux.

Il faloit en éfet, dans l’Etat où étoient les choſes, une perſonne qui ſût joindre les talens militaires aux