Page:De Scudery - Alaric, ou Rome vaincue, 1654.djvu/105

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Il va de bord en bord, de l’un à l’autre bout ;
Et remet l’assurance, et le calme par tout.
Mais Rigilde qui voit son entreprise vaine,
Lors que le feu s’esteint, sent r’allumer sa haine ;
Accuse ses demons ; s’accuse le premier ;
Et pour perdre Alaric, perdroit le monde entier.
Il deteste son art, comme un art inutile ;
Son ame luy paroist peu forte et peu subtile ;
Il voit en soûpirant, cette forest de mats ;
Enfin il doute ; il craint ; mais il ne se rend pas.
Cependant de par tout, viennent les gents de guerre ;
Desja d’un camp nombreux, ils ont couvert la terre ;
Et les beaux champs de Birch, et les bords du marais,
Sont desja tous remplis, de bataillons espais.
O muse que j’escoute, et que le ciel inspire,
Instruits toy de leur nombre, afin de me le dire :
Et redis moy les noms, de ces peuples du Nord,
Qu’un beau desir de gloire, amena sur ce port.
Trente mille soldats, de la fiere Gothie,
Qui se disent sortis de l’antique Scythie,
Paroissent les premiers, avec l’arc à la main,
Conduits par Radagaise, au courage hautain.
Ils ont tous sur l’espaule, un carquois fait d’escorce,
Remply de traicts aigus, qui volent avec force :
De plumes de vautour, leur front est ombragé,
Et d’une large espée, ils ont le flanc chargé.
Les sauvages voisins du froid golphe Bothnique,
Dans leurs robustes mains, tenans tous une pique,
Arrivent les seconds,