Page:De Scudery - Alaric, ou Rome vaincue, 1654.djvu/125

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Regrette en soûpirant, le lieu qu’il a quitté ;
Semble se repentir de sa temerité ;
Leur remet en l’esprit leurs campagnes fertiles ;
Et leur oppose apres les Alpes si steriles :
Dit qu’ils mourront de faim sur ce bord estranger,
Et que la guerre enfin, est leur moindre danger.
Apres, jettant les yeux sur l’esclat de leurs armes,
Et feignant finement de cacher quelques larmes,
O mes chers compagnons, leur dit-il, quel butin,
Allons nous adjouster à l’empire latin !
Nous quittons le certain, pour la gloire incertaine :
L’un est un corps solide, et l’autre une ombre vaine :
Et l’or de nostre armure, et qui brille en nos mains,
N’est qu’un riche tribut que l’on porte aux Romains.
Celuy qui des pescheurs qui sont venus des isles,
Veut esbranler l’esprit par ses ruses subtiles,
Sans employer son art en discours superflus,
Les pique par l’endroit qui les touche le plus.
O compagnons, dit-il, quelle fureur nous mene ?
Quoy ! N’avez-vous point sceu quelle est la mer Thyrrene ?
Et pourquoy portons nous la ligne et l’hameçon,
Allant sur cette mer qui n’a pas un poisson ?
Celuy qui des voisins de la polme rapide,
Tache de rendre alors le courage timide,
Leur dit, en desguisant le crime de l’enfer,
Helas ! à quoy nous sert nostre mine de fer ?
Du plus haut de ces monts qui bornent l’Italie,
Pour punir nostre audace, ou bien nostre folie,