Page:De Scudery - Alaric, ou Rome vaincue, 1654.djvu/158

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Ses yeux sont grands et clairs ; sa poictrine est fort large ;
Sa croupe est ronde, pleine, et fort propre à la charge ;
L’on voit bien qu’il est fort autant comme il est doux ;
Et son fanon luy pend jusques sur les genoux.
De beaux chapeaux de fleurs ses cornes sont ornées :
D’un long rang de rochers ces plaines sont bornées :
Et les flots de la mer y semblent agitez,
Tant ces superbes flots sont bien representez.
Vers le haut du tableau volent et se balencent,
Divers petits amours qui semblent qui s’eslancent :
Ils monstrent Jupiter, et sont tous glorieux,
De se voir les vainqueurs du monarque des cieux.
Alaric admirant cette rare peinture,
De ce dieu desguisé souhaite l’avanture :
Mais sans plus s’arrester sur un objet si beau,
Ses yeux sont attirez par le second tableau.
Il voit l’isle de Chypre en ce lieu figurée ;
Il voit le mont Olympe, et la plaine azurée ;
Il voit au bord de l’onde un pavillon tendu,
Sur des mirthes fort hauts, mollement estendu :
Et sous ce pavillon il aperçoit encore,
La reyne des beautez, avec Mars qui l’adore :
Ils sont assis sur l’herbe, et dans un sombre jour,
On voit briller l’esclat de la mere d’amour.
Ses cheveux ondoyans, à boucles naturelles,
La font paroistre aymable, et belle entre les belles :
Et les roses qu’elle a n’ont pas tant de fraischeur,
Que parmy l’incarnat son teint à de blancheur.