Page:De Scudery - Alaric, ou Rome vaincue, 1654.djvu/183

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Et que peut-on attendre en voyant cette mort,
Si mesme le pilote a fait naufrage au port ?
Souvent, respond Wermond, et la honte, et la gloire,
Et le bien, et le mal, la fuite et la victoire,
Se suivent de fort pres ; et souvent le destin,
Change et rechange encor, du soir jusqu’au matin.
La mer paroist tranquile apres un grand orage,
Et quand il est passé l’on ne fait point naufrage :
Et ce grand coup de vent qui sousleve les flots,
Fait cesser la tempeste, et nous met en repos.
Invincibles guerriers, la gloire nous apelle,
Mais c’est par l’Apennin qu’il faut aller vers elle ;
Mais c’est d’un noble feu que nous devons bruler ;
Mais c’est en avançant au lieu de reculer.
Entre ces deux advis se partagea la troupe,
Que l’on voyoit alors sur la royale poupe :
Et par le nombre esgal, l’inesgal sentiment,
Incertain et douteux, balence absolument.
Comme on voit quelquesfois entre deux calamites,
Dont la force pareille a les mesmes limites,
Le fer, qui suspendu, nous force à l’admirer,
Sans que ces deux aimans le puissent attirer.
De mesme en ce conseil, d’esgale violence,
Entre ces deux advis la chose est en balence :
Et la nuit qui survient les remene à leur bord,
Sans que leurs sentimens puissent estre d’accord.
Mais lors qu’elle eut meslé parmy ses sombres voiles,
Et l’argent de la lune, et celuy des estoiles,
Et mis