Page:De Scudery - Alaric, ou Rome vaincue, 1654.djvu/184

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toute la flote en un profond repos,
Un ange au vieux prelat fit oüir ces propos.
Leve-toy, leve-toy, le ciel te le commande,
Obeïs promptement, et fais ce qu’il te mande.
Alaric n’est point mort ; Alaric voit le jour ;
Et si tu m’obeïs on verra son retour.
R’assure, en me croyant, ton ame espouventée :
Il faut oster au prince une bague enchantée ;
La jetter dans la mer ; et d’un cœur sans effroy,
Faire finir le charme, et delivrer le roy.
Par un calme profond la flote retenuë,
Où tu la quitteras, attendra ta venuë :
Et les vents enfermez dans les thresors de dieu,
La laisseront à l’anchre, et dans ce mesme lieu.
Fais voguer ta chaloupe à rames mesurées ;
Traverse dans la nuit les plaines azurées ;
Je seray ton pilote, et le soleil levant,
Te fera voir une isle, et ce prince vivant.
Ton incredulité par ton zele excusée,
Obtiendra le pardon pour ton ame abusée :
Mais repare ta faute, et sans perdre un moment,
Je te le dis encor, obeïs promptement.
Ces mots imperieux, d’une occulte puissance,
Exigent du prelat la prompte obeïssance ;
Il s’assied ; il se leve ; et dans son repentir,
Je suis prest, respond-il, je suis prest à partir.
A l’instant par son ordre on descend la chaloupe :
Et repassant des yeux la maritime troupe,