Page:De Scudery - Alaric, ou Rome vaincue, 1654.djvu/266

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mille chemins conduisent à l’enfer,
Mais on ne revient point de ses portes de fer.
Or dans le plus profond de l’effroyable gouffre,
Par tout on voit ramper une flâme de souffre,
Dont la couleur bluastre au rouge se meslant,
Tapisse horriblement le noir palais bruslant.
C’est là que les demons, prenant part à leurs gesnes,
Souffrent et font souffrir les plus horribles peines :
C’est là que Lucifer, dont l’orgueil est si haut,
Trouve en un mesme lieu le thrône et l’eschaffaut.
C’est en ce triste lieu qu’il endure et commande :
C’est là qu’il fit venir son infernale bande :
C’est là que luy parla le monarque d’enfer,
Dont le thrône est de flâme, et le sceptre de fer :
C’est là que par orgueil se faisant violence,
Il suspendit ses maux ainsi que leur souffrance :
Et que malgré les cris des esprits forcenez,
Il imposa silence aux plaintes des damnez.
Alors laissant sortir sa colere allumée,
Il pousse un grand soûpir de flâme et de fumée :
Et le feu luy sortant de la bouche et des yeux,
En frapant sur son thrône il fait trembler ces lieux :
Et d’une voix tonnante il forme ces paroles,
Capables d’esbranler la fermeté des poles :
Lors que tous ces demons à l’entour de leur roy,
Eurent aussi tremblé de respect et d’effroy.
Illustres compagnons de mon illustre faute,
Vous dont la vanité fut si noble et si haute :