Page:De Scudery - Alaric, ou Rome vaincue, 1654.djvu/303

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du roy, fait que malgré la mort,
Tout quitte les vaisseaux ; tout saute sur le port.
Les chefs des braves Goths, dés qu’ils sont sur le sable,
Forment des bataillons la face redoutable :
Et la pique baissée, et suivis de l’effroy,
Marchent pour desgager leur invincible roy.
Mais ce puissant secours estoit peu necessaire,
Aucun n’aprochant plus d’un si grand adversaire :
Car les horribles coups qu’il a desja donnez,
Retiennent loin de luy les soldats estonnez.
Comme aux champs de Lybie un lion qui pantelle,
Fait que les chiens ardents, qui de sa dent cruelle
Et de sa griffe encore, ont senty la vigueur,
S’arrestent en desordre, et demeurent sans cœur.
Ainsi le grand heros, lassé des coups qu’il donne,
Voit à l’entour de luy le gros qui l’environne :
Et qui bien qu’il soit las, n’ose plus aprocher
Du redoutable bras qui luy couste si cher.
Mais ce jeune lion ayant repris haleine,
Fait couler à grands flots le sang parmy l’arene :
Et chassant, et perçant ce gros d’Iberiens,
Il se revoit enfin à la teste des siens.
Alors d’Athalaric la troupe commandée,
Marche sous le grand chef dont on la voit guidée :
Et le fier Espagnol qui sçait bien son devoir,
Fait avancer un corps, et le va recevoir.
Alonse est à leur teste, homme de grand courage,
Que le soleil vit naistre aux bords dorez du Tage :