Page:De Scudery - Alaric, ou Rome vaincue, 1654.djvu/307

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

du grand succés,
Sentent de leur fureur accroistre encor l’accés.
La douceur d’Alaric redouble leur furie :
Et ne pouvant plus rien sur les bords d’Iberie ;
Et voyant dans la guerre une image de paix ;
Ils partent enragez dans un nuage espais.
Car pour choquer encor ses grandes destinées,
Ils volent à l’instant vers les monts Pirenées :
Où de leurs hauts sommets la Gaule costoyant,
Sur les Alpes en suite ils fondent en bruyant.
Comme on voit un faucon du plus haut de la nuë,
Où par l’esloignement sa grosseur diminuë,
Fondre, ou plutost tomber dans les champs spacieux,
Où les perdrix qu’il voit ont arresté ses yeux.
Rigilde tout de mesme, et celuy qui le porte,
Fondent, et fendent l’air d’une aisle encor plus forte :
Et se trouvent meslez apres un si grand saut,
Aux Romains embusquez qu’ils ont veus de si haut.
Cependant le heros à l’entour des murailles,
Du brave Athalaric fait voir les funerailles :
Et meslant en ce jour le cypres au laurier,
Rend les derniers devoirs au genereux guerrier.
D’un air lent et plaintif, les trompetes sonnantes ;
Les troupes les yeux bas, et les armes traisnantes ;
Marchant avec un ordre aussi triste que beau,
Filent depuis le camp jusques au grand tombeau.
D’un crespe noir et clair les enseignes couvertes,
Traisnent non-chalamment sur les campagnes vertes :