Page:De Scudery - Alaric, ou Rome vaincue, 1654.djvu/457

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Celuy-cy le repousse ; et cét autre à son tour,
Dans cette sombre nuit luy desrobe le jour.
Il tombe renversé sur les rangs qui le suivent ;
Mais sans s’espouventer, ces fiers guerriers poursuivent :
Et sans s’espouventer, les invincibles Goths,
Ne donnent à leurs bras, ny tréve, ny repos.
L’attaque est vigoureuse autant que la deffence :
Cette sombre victoire est encor en balence :
Encore la fortune est dans le mesme point :
Et le destin douteux ne se declare point.
Mais durant qu’en ce lieu tout paroist indomptable,
Vers l’autre bout du camp un bruit espouventable,
S’esleve en un instant ; et cent et cent flambeaux,
Brillent et font briller le Tybre aux noires eaux.
L’alarme se redouble, et la troupe enflâmée,
Porte l’embrazement dans le parc de l’armée :
Desja le feu s’augmente ; et sur les pavillons,
Desja la flâme rampe, et court à gros boüillons.
Tiburse le premier, avec la torche ardente,
Lance de toutes parts la flâme et l’espouvente :
Et mille comme luy jettent de tous costez,
D’un feu qui n’esteint point, les funestes clartez.
Partout l’embrazement laisse de rouges pistes :
Beliers à front d’airain ; catapultes ; balistes ;
Tours ; eschelles ; pontons, bastis artistement ;
Fascines ; gabions ; tout brusle en un moment.
Le feu se communique, et va de tente en tente :
Il s’accroist par le vent, et sa fureur s’augmente :
Et le camp